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Les balcons en copropriété : Parties communes ou privatives ?

CA  CHAMBERY 6 septembre 2016 °14/02808 ( à publier)

 

Au terme de l’article 14 de la Loi du 10 juillet 1965, le syndicat a pour objet la conservation de l’immeuble et l’entretien des parties communes.

 

Pour assurer le respect de cet objet, il peut et doit faire réaliser des travaux de conservation ou d’entretien de l’immeuble et des équipements communs.

 

Ces travaux devront être approuvés par une assemblée générale selon une majorité déterminée par le type de travaux envisagés.

 

Il ne peut en aucun cas décider de travaux sur les parties privatives à l’exception des travaux dits d’intérêt collectifs dans un but d’économie d’énergie (article 25 de la Loi du 10 juillet 1965).

 

Une fois ces évidences établies, le serpent de mer du balcon en copropriété resurgit.

 

En effet, quel professionnel n’a pas déjà croisé sur sa route un règlement de copropriété  se contentant d’être taisant à leur sujet ou les classant parmi les parties privatives ?

 

Dans ces circonstances se pose inéluctablement la question des travaux les concernant et de leur dépense

 

Rappelons que la loi du 10 juillet 1965 dispose dans son article 2 alinéa 1er  que « sont privatives les parties du bâtiment et des terrains réservés à l’usage exclusif d’un copropriétaire déterminé ».

 

Cette disposition doit être nécessairement rapprochée de l’article 3, alinéa 1er  de cette même Loi qui dispose, quant à lui, que « sont communes les parties des bâtiments et terrains affectés à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux. »

 

La loi du 10 juillet 1965 insiste donc sur le critère d’exclusivité de l’usage pour déterminer, au-delà du règlement de copropriété, la nature de commun ou de privatif d’un espace.

 

Il en découle ainsi, qu’en l’absence de mention particulière dans un règlement de copropriété, l’intéressé désirant connaître la qualification d’une partie de l’immeuble devra procéder de la manière suivante :

Tout d’abord vérifier si la partie figure sur la liste de l’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 réputant en partie commune un certain nombre d’éléments tels que le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d’accès etc…

Si tel est bien le cas, la partie prendra automatiquement la qualification de parties communes en vertu de la présomption légale.

 

Dans le cas contraire, il faudra mettre en œuvre le critère de l’exclusivité d’usage, prescrit par l’article 2 précité, pour déterminer s’il est fait un usage individuel ou au contraire collectif de cette partie.

La jurisprudence insiste tout particulièrement sur la nécessité de recourir à ce critère de distinction ( Cass 3ième civ 14 février 1990, n°88-17781, Bull Civ IIIn°49 ; Cass 3ième Civ 27 février 1991, n°89-18 150…)

 

Les dispositions des articles 2 et 3 de la loi du 10 juillet 1965 sur le caractère privatif ou commun des parties de l’immeuble sont perçues comme étant supplétives de volonté.

En effet, l’article 43 de cette même loi répute non écrite toute clause contraire aux dispositions des articles 6 à 37, 41-1 à 42 et 46 sans faire référence à ces deux articles.

Les indications mentionnées dans les premiers articles de cette loi n’ont donc pas de caractère obligatoire ou d’ordre public et constituent une simple présomption ne s’appliquant que « dans le silence ou la contradiction des titres. »

 

S’agissant du cas particulier des balcons, il est d’ores et déjà possible d’affirmer qu’ils ne sont pas visés dans l’énumération des parties d’immeubles «  réputées parties communes ».

 

Il appartient donc au règlement d’en fixer la nature a défaut il conviendra d’appliquer les critères, sus évoqués, et posés par les articles 2 et 3 de la Loi du 10 juillet 1965.

 

Cette application doit nécessairement être accompagnée d’une lecture éclairée de la jurisprudence.

 

Cette dernière afin d’établir le caractère privatif de balcons retient que « dans le silence du règlement de copropriété, on peut les classer dans les parties privatives au motif que les copropriétaires en ont l’usage exclusif »(CA Aix en Provence 9 octobre 1978 Bull Aix en Provence 4/1978 n°173).

 

Cette solution n’était pas satisfaisante dans la mesure où le balcon, dans sa structure, fait nécessairement partie intégrante du gros œuvre, réputé, selon l’article 3 sus cité, partie commune de l’immeuble.

 

Une jurisprudence d’espèce de la Cour d’Appel de de CHAMBERY en date du 6 septembre 2016 apporte un nouvel éclairage.

 

En l’espèce, assez classiquement le règlement de la copropriété en question prévoyait en ses stipulations  qu’étaient parties communes « les gros murs de façades, des pignons et des mitoyennetés, l’ossature en maçonnerie, les ornements de façades non compris les gardes corps, les balustrades, les balcons, les balconnets et les terrasses ».

Un autre article de ce même règlement intégrait dans les parties privatives lesdits balcons.

 

Le débat semblait clos et le coût des travaux touchant aux balcons, privatifs.

 
Néanmoins dans sa décision la Cour d’Appel de CHAMBERY fait œuvre d’une certaine originalité et retient qu’  « un balcon se définit techniquement comme une dalle en saillie sur façade, une dalle étant quant à elle, un ouvrage porteur horizontal…et formant un plancher. »

 

« Dès lors, ces balcons font partie intégrante de l’ossature de l’immeuble puisque ces dalles ne sont que le prolongement des planchers des appartements et qu’elles sont indissociablement liées au gros œuvre par leur ferraillage. »

 

Ainsi cette Cour en conclut que « si l’espace occupé par un copropriétaire à l’intérieur du balcon est privatif et si son aménagement et ses gardes corps peuvent être des parties privatives, il ne peut en être de même concernant la structure du balcon en béton armé, qui fait partie intégrante de celle de l’immeuble tout entier »

 

La Cour d’Appel de CHAMBERY a donc interprété ce règlement de copropriété en faisant du gros œuvre des balcons une partie commune…

 

Ainsi s’opère désormais une dichotomie entre l’espace situé à l’intérieur du balcon qui peut être privatif et le gros œuvre de ce même balcon, qui faisant partie de l’armature de l’immeuble, est nécessairement partie commune.

Le Cabinet NAUDIN, Avocats sur le ressort de la Cour d'Appel d'Aix en Provence, se tient à votre disposition pour toutes difficultés touchant au droit de la copropriété.

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