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Le Syndicat des copropriétaires : un non professionnel mais pas un consommateur.


Par une décision récente, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation, reprenant une jurisprudence désormais établie, vient nous rappeler que si le syndicat des copropriétaires était effectivement un non professionnel, il n'est pas pour autant un consommateur (Civ 3ème 28 septembre 2022 pourvoi n°21- 19 829)

Elle en tire pour conséquence logique que "L'article L. 218-2 du code de la consommation, qui réserve aux seuls consommateurs le bénéfice de la prescription biennale de l'action des professionnels pour les biens et les services qu'ils fournissent, n'est pas contraire à l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales puisque les consommateurs, personnes physiques, ne sont pas placés dans une situation analogue ou comparable à celle des non-professionnels, personnes morales. Dès lors, c'est à bon droit qu'une cour d'appel retient qu'un syndicat de copropriétaires ne peut se prévaloir de cette prescription biennale"
Rappelons à ce sujet que l'article L. 136-1 du Code de la consommation impose à tout professionnel, titulaire d'un contrat de prestations de services au profit d'un consommateur ou d'un non-professionnel, d'informer ce dernier de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite.
La notion de consommateur concerne exclusivement des personnes physiques.
Mais qu’en est-il de la notion de non professionnel ?
La question de savoir si les personnes morales pouvaient se prévaloir des dispositions du code de la consommation et précisément de cet article L. 136-1 s’était également posée.
Dans un premier temps, la Cour de cassation a admis qu'une personne morale pouvait être considérée comme un consommateur (Cass. 1re civ., 23 févr. 1999, n° 96-21.744 : Bull. civ. 1999, I, n° 59. - Cass. 1re civ., 5 mars 2002, n° 00-18.202).
La directive CEE 93-13 du 5 avril 1993, transposée par la loi du 1er février 1995, avait distingué le consommateur du professionnel.
Le consommateur y était défini comme «  toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle » et le professionnel comme une « personne physique ou morale qui agit dans le cadre de son activité professionnelle ».
La définition de professionnel permettait d'admettre qu'un non-professionnel est une personne physique ou morale qui n'agit pas dans le cadre de son activité professionnelle.
C'est dans ces conditions qu'au terme d'un arrêt de 2005, la Cour de cassation a considéré que la notion de non-professionnel, notion distincte de celle de consommateur, n'excluait pas les personnes morales.
La question s’est alors posée de savoir si une personne morale et précisément un syndicat des copropriétaires pouvait être, à ce titre, considéré comme un non-professionnel ?
Une réponse ministérielle est venue préciser que « la fonction essentielle et permanente du syndicat est l'entretien et la conservation de l'immeuble dans le cadre des mandats que lui donne l'assemblée générale des copropriétaires ».
Dès lors « le syndicat de copropriétaires se trouve dans la même situation qu'un consommateur dans ses rapports avec ses fournisseurs et prestataires de services ordinaires ».
Dans un arrêt du 23 juin 2011, la Cour de cassation est venu   confirmer que l'article L. 136-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, n'exclut pas de la catégorie des non-professionnels les personnes morales.
Conformément à ce qu'elle avait déjà jugé en 2005, la Cour de cassation confirme, en l'appliquant à un syndicat des copropriétaires, que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non-professionnels.
Le syndicat des copropriétaires est donc un non professionnel qui peut donc invoquer les dispositions de la Loi CHATEL.
Néanmoins, est-il pour autant un consommateur ?
Par essence non et la Cour de Cassation l’a rappelé dans un arrêt du 04 juin 2014.
En vertu des articles L.131-1 et L 421-6 du Code de la Consommation, une association de consommateurs peut agir devant la Juridiction Civile en suppression des clauses abusives ou illicites contenues dans les contrats proposés par les professionnels  aux non professionnels qu’ils soient personnes morales ou physiques.
En l’espèce, une association de consommateurs avait ainsi considéré que l’Article L 132-1 du Code de la Consommation était applicable à un Syndicat de copropriétaires en sa qualité de non professionnel, le Syndicat devant être considéré comme une organisation légalement instituée rassemblant des Copropriétaires / Consommateurs.
La question se posait dès lors de savoir si cette Association agréée (U.F.C) pouvait agir en suppression de clauses abusives ou illicites contenues dans un contrat de Syndic proposé à des Syndicats de Copropriétaires.
La Cour de Cassation a considéré qu’une telle association n’est recevable à agir que pour les contrats destinés aux consommateurs, ce qui n’est pas le cas d’un Syndicat de Copropriétaires.
La Cour de Cassation rappelle ainsi à l’ordre certaines Cours d’Appel qui accordaient ce statut de consommateur au syndicat des copropriétaires (cour appel montpellier 9 octobre 2013).
Le Syndicat des copropriétaires est donc un non professionnel et pas un consommateur.
 Cette décision ne remet donc pas en cause la qualité de non professionnel admise pour le Syndicat (Cass. civ. 1ère - 23 juin 2011 - n°10-30.645) ni ses conséquences pour le bénéfice de la loi CHATEL (art. L.136-1 du code de la consommation)

Cependant, cette décision exclut désormais la possibilité pour un Syndicat de se prévaloir de la prescription biennale du code de la consommation (L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » ) applicable aux actions des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs et que certaines juridictions du second degré avaient pu appliquer au bénéfice de syndicats.
 
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