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Syndicat secondaire : une approche pragmatique de la Cour de Cassation (Civ 3ème 30 novembre 2023 Pourvoi n° 22-21.579)



1.) Conditions d’existence du syndicat secondaire : du critère physique au critère fonctionnel
 
Afin de faciliter l’administration des grandes copropriétés composées de plusieurs bâtiments, la loi du 10 juillet 1965 a prévu plusieurs outils permettant de les subdiviser.
Parmi ceux-ci, l’article 27 de cette loi permet la création de syndicats secondaires.  
 
Cet article, dans sa version originale, disposait que :
 
Lorsque l'immeuble comporte plusieurs bâtiments, les copropriétaires dont les lots composent l'un ou plusieurs de ces bâtiments peuvent, réunis en assemblée spéciale, décider, aux conditions de majorité prévues à l'article 25, la constitution entre eux d'un syndicat, dit secondaire.

Ce syndicat a pour objet d'assurer la gestion, l'entretien et l'amélioration interne de ce ou ces bâtiments, sous réserve des droits résultants pour les autres copropriétaires des dispositions du règlement de copropriété. Cet objet peut être étendu avec l'accord de l'assemblée générale de l'ensemble des copropriétaires statuant à la majorité prévue à l'article 24.

Le syndicat secondaire est doté de la personnalité civile. Il fonctionne dans les conditions prévues par la présente loi. Il est représenté au conseil syndical du syndicat principal, s'il en existe un. »
 
Ainsi, lorsque l'immeuble comportait plusieurs bâtiments, physiquement indépendants, les copropriétaires dont les lots composaient l'un ou plusieurs de ces bâtiments pouvaient, réunis en assemblée spéciale, décider, aux conditions de majorité prévues à l'article 25, la constitution entre eux d'un syndicat secondaire.
 
Cet article posait comme condition essentielle à la création d’un syndicat secondaire la stricte indépendance physique des bâtiments. C’est ainsi que ne pouvaient pas constituer de syndicats secondaires, deux immeubles partageant un même gros œuvre, un sous-sol et dont les rez-de-chaussée étaient occupés par un même local commercial .

Cette indépendance physique excluait ainsi de la possibilité de création de syndicats secondaires les cages d’escaliers d’un même bâtiment , des bâtiments imbriqués dans leur gros œuvre .
 
Cette notion de stricte indépendance physique a été remise en cause par l’ordonnance du 30 octobre 2019 qui a modifié la lettre de l’article 27 en introduisant la notion d’ « entités homogènes susceptibles d’une gestion autonome ».
 
Ainsi et depuis le 1er juin 2020, lorsqu’un immeuble comporte plusieurs bâtiments ou plusieurs entités homogènes susceptibles d’une gestion autonome, la création de syndicats secondaires est possible.
 
Le concept d’entité structurelle liée à l’indépendance physique des bâtiments semble donc abandonné au profit d’une approche liée au fonctionnement et à la gestion de l’entité souhaitant devenir indépendante.
 
Il va donc être désormais possible d’envisager au sein de copropriétés complexes, d’un seul tenant physique, de créer des syndicats secondaires regroupant des locaux ou lots, présentant une communauté d’intérêts et donc susceptibles d’une gestion autonome.
Tel pourra, par exemple, être le cas, de regroupement de locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée d’un immeuble ou de sous-sols de parkings.
 
Il ne fait aucun doute que la jurisprudence devra dessiner les contours de cette nouvelle notion.
 
2.) Création d’un syndicat secondaire
 
Ces syndicats secondaires peuvent être créés au cours de la vie de la copropriété par décision d’une assemblée générale spéciale des copropriétaires du bâtiment ou de l’entité homogène à l’origine de cette démarche. Cette réunion est une exigence de la loi, faute de quoi il sera impossible de constituer un syndicat secondaire . Cette décision sera prise à la majorité absolue des copropriétaires concernés ( article 25 de la loi du 10 juillet 1965) et pourra, depuis le 1er juin 2020 , bénéficier d’un second vote immédiat comme le prévoit l’article 25-1 de cette même loi.
 
La jurisprudence admet, cependant, que des syndicats secondaires aient pu être initialement prévus dans le règlement de copropriété sans pour autant qu’une assemblée générale spéciale ne soit nécessaire à leur constitution. 
 
La Loi n’impose aucune autre condition à la création d’un syndicat secondaire.
 
Se posait alors la question de l’éventuelle contestation de l’assemblée générale « spéciale » ayant décidé de la création d’un syndicat secondaire.
 
Interrogée sur cette exacte question, la Cour de cassation devait prendre une  décision le 30 novembre 2023 ( civ 3ème 30 novembre 2023 Pourvoi n°22-21579). Selon la juridiction du quai de l’horloge, il résulte de l'article 27 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 que les copropriétaires des lots concernés par le syndicat secondaire décident seuls de la constitution de celui-ci dans le cadre d'une assemblée générale spéciale à laquelle le syndicat principal n'est pas convoqué.
 
Dès lors, l'instance, qui a pour objet l'annulation d'une telle assemblée et la suppression consécutive d'un syndicat secondaire qui y a été créé, a pour finalité de juger, au sens de l'article 14 du code de procédure civile, ce seul syndicat secondaire.
 
 
En conséquence, le syndicat principal n'a pas à y être entendu ou appelé.
Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.
 
3.) Fonctionnement d’un syndicat secondaire
 
Étant dotés de la personnalité civile, l’existence de tels syndicats secondaires a d’importantes conséquences sur l’organisation de la copropriété.
En effet, au terme de l’article 27 de la loi du 10 juillet 1965, « Le Syndicat secondaire est doté  de la personnalité civile. Il fonctionne dans les conditions prévues par la présente loi. Il est représenté au conseil syndical du syndicat principal s’il en existe un. »
 
Il découle de cet article et de la jurisprudence s’y rapportant que l’objet du syndicat secondaire est limité à la gestion, l’entretien et à l’amélioration des bâtiments pour lesquels il a été constitué. Il ne peut ainsi voter sur une question qui n’entre pas dans son objet initial  et, à l’inverse, la décision du syndicat principal prise dans un domaine qui est du ressort du syndicat secondaire est nulle .
 
Les décisions du syndicat secondaire sont obligatoirement prises en assemblées particulières de ce syndicat et non dans et au cours de l’assemblée du syndicat principal .
 
D’une manière plus générale, le syndicat secondaire fonctionnant dans les mêmes conditions qu’un syndicat classique et ayant la personnalité morale, il sera soumis à toutes les obligations légales relatives à l’organisation collective, il doit donc être pourvu de tous les organes d’un syndicat (syndic, conseil syndical…) et doit prendre ses décisions au cours d’assemblée générales qui lui sont propres.
 
 
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